Le dernier des hérauts chrétiens, Francis Bacon, alias William Shakespeare, écrit vers 1600 à propos de Mahomet:" Chez les chrétiens, il y a deux glaives, le spirituel et le temporel [...]. Mais nous ne devons pas nous servir du troisième glaive, qui est l'épée de Mahomet, ou qui lui ressemble, à savoir propager la religion par des guerres ou des persécutions sanguinaires." (Essays, t.VI, p383)
L'usage de la raison pour les choses spirituelles, et la latitude qui est sienne, sont très importants et d'une étendue générale. Ce n'est pas pour rien en effet que l'apôtre appelle le christianisme "notre culte raisonnable de Dieu (Romains, 12,1.) : même les cérémonies de l'ancienne loi et les symboles qu'elles contenaient étaient pleins de raison et de signification, bien plus assurément que celles de l'idolâtrie et de la modernité, qui sont, elles, pleines de symboles et de calculs dépourvus de sens et de raison (comme les nombres irrationnels ou les trous noirs). Mais ici comme toujours, la foi chrétienne mérite d'être hautement exaltée, puisque sur ce point elle respecte le juste milieu, qui est d'or ("Aurea mediocritas"), entre la loi des païens et celle de Mahomet, qui ont chacune respectivement opté pour l'un des deux extrêmes, car la première ne comportait pas de croyances constantes, ni de profession de foi, elle laissait tout à la libre discussion, tandis que celle de Mahomet interdit, à l'inverse, complètement la discussion: l'une présente donc le visage même de l'errance, l'autre celui d'une chose abusivement imposée (l'imposteur étant celui qui en impose aux autres, l'"imponere" cicéronien, qui s'utilise notamment quand on impose des lois par la force à un peuple).
La foi, elle, admet ou rejette la controverse avec discernement.
Quand Moïse vit l'Israélite et l’Égyptien se battre, il ne demanda pas :"pourquoi vous battez-vous?", il tira le glaive et massacra l’Égyptien (Exode, 2, 11-13.). Quand au contraire il vit les deux israélites se battre, il déclara: "Vous êtes frères, pourquoi vous battez-vous?" (Actes 7, 24-28.) Si tel point de doctrine est comme un Égyptien, il doit être massacré par le glaive de l'esprit, sans aucune conciliation. Mais s'il est comme un Israélite, même en tort, alors il faut prononcer: "pourquoi vous battez-vous?"
A propos des points fondamentaux, nous voyons que notre Sauveur délimite la ligne de la manière suivante: " Celui qui n'est pas avec moi est contre moi." (Matthieu 11, 30), mais pour les points qui ne sont pas fondamentaux, il dit: "Celui qui n'est pas contre vous est avec vous." (Luc 9,50.).
L'habit de notre sauveur était d'une seule pièce, sans couture, et telle est aussi la doctrine des Écritures en elle-même; mais l'habit de l’Église a toujours été de plusieurs couleurs sans que les lignes de division soient marquées, tel un arc en ciel.
j'ai placé mon arc dans la nue, et il servira de signe d'alliance entre moi et la terre.
Genèse 9,13.
Celui qui était assis avait l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine; et le trône était environné d'un arc-en-ciel semblable à de l'émeraude.
Apocalypse 4,3.
Je vis un autre ange puissant, qui descendait du ciel, enveloppé d'une nuée; au-dessus de sa tête était l'arc-en-ciel, et son visage était comme le soleil, et ses pieds comme des colonnes de feu.
Apocalypse 10,1.