Le type se sent devenir Bardamu : je regarde que les films de guerre, je me sens aussi bas de la morale qu’un cinéaste, je préfère ces films à la guerre elle-même, même si je l’ai jamais faite, a-t-il l’honnêteté d’ajouter. Une fois devrait suffire pour peu qu’on y survive, je suppose qu’aurait dit le vrai Bardamu. En revanche on peut pas dire que ce soit vrai pour l’humanité vu le nombre de guerres qu’elle a connu. Elle apprend pas vite la gueuse. Une oublieuse, l’humanité. Odieuse pour tout dire. Les humanistes se shootent à quoi, qu'on me le dise ! au futur antérieur ? Aux rêves de progrès ? C’est peut-être ça qui les rend infâmes ! Juste le contraire de ce qu’il faut faire en somme. Au lieu de rêver d’un paradis sur la terre, mieux dresser un constat pessimiste dès les premiers massacres. Ce qu’a pas manqué de faire le Christ, forcément, peu d’élus après ça.
Les guerres n’ont jamais été que des règlements de compte, des additions des soustractions, des pingouins cupides à enrôler des divisions d’obligés notoires, vous et moi, pour aller se massacrer à leur place au nom d’un territoire remplis de meubles et d’immeubles même pas à nous. Le goût de l’honneur est une saloperie à la puissance, les honneurs qu’on doit à tel héros de la guerre est à la force de l’estomac, une gageure, un renvoi. Les vomir tous ces vendeurs de rêves, ces rêveurs de ventes. Leurs progrès on en a vu les limites. Leur nouvelle technologie à exalter la médiocrité, leur culture en perfusion, leur cinéma esthétique, leur poésie inepte, leur musique robotisée, leur Internet salace. Et tout ce qu’un De Gaule a été foutu de nous apporter à nous françouzes : du nucléaire. De quoi se faire sauter le caisson des millions de fois. Qu’est-ce qu’on pouvait attendre d’un type pareil, je vous le demande, un acteur contrarié ! Mon Bardamu finit par me révéler qu’il n’a aimé qu’un seul film de guerre, Voyage au bout de l’Enfer avec ce diable de Robert de Niro en personne. C’est son Voyage au bout de la Nuit en somme. A la différence que ni les acteurs ni l’auteur du film n’ont été persécutés comme Céline.
L’apocalypse au cinéma c’est gentil, tant qu’à faire, je préfère encore une farce sur la shoa comme La Vita Bella de Bégnini. Encore qu’on pourrait étendre le propos bien au-delà de l’Allemagne nazie. Certes aujourd’hui le personnel de Pôle Emploi vous poursuit pas à coup de mitraillette, c’est beaucoup plus subtil, les proprio sont dans leur droits, etc., mais l’ordre règne tout autant, comme on dit. Et à voir comment chacun court après son identité, ça sent pas bon du tout. Mon film préféré c’est La Planète des Singes, au moins ça fait pas rêver. C’est pas comme The Foutain Man d’Ayn Rand qui prend Aristote pour un rêveur du temps qu’il écoutait son maitre Platon avant de le prendre à contre-pied, à contre-rêve. L’homme est un animal naturellement politique qu’il a dit après ça Aristote, et les couillons ont compris que la politique était ce qui différenciait l’homme de l’animal alors que c’est quand il devient naturel, animal, que l’homme est politique, voilà ce qu’il dit vraiment Aristote. Les singes sont là pour nous le démontrer. Et à défaut les fourmis les abeilles ou les loups.
En fin de compte quand on se sera débarrassé de la politique et de la société on aura plus besoin de cinéma, encore un peu de persévérance. Après si on me demande ce que je ferais en cas de guerre, j’ai pas la réponse mais j’y réfléchis, patience.