Nos doutes sont des traîtres, qui nous font souvent perdre, par crainte de le tenter, le bien que nous aurions pu gagner.
Mesure pour mesure W. Shakespeare
« Il est tout simple de nous baisser pour ramasser le joyau que nous voyons ; mais nous foulons aux pieds le trésor que nous ne voyons pas, sans jamais y songer. »
Hé oui, on croit voir plein de belles choses partout alors on se baisse on ramasse et un jour on s’aperçoit bêtement qu’on a passé son temps à côté de la vérité. Quand on ne l’a pas piétinée ! La plupart des gens sont indulgents pour eux-mêmes et durs avec les autres. Mais un type comme moi peut se permettre aucune complaisance. Ni pour moi ni pour les autres. On est rendu à ce point quand on a déchiré suffisamment le rideau pour voir de quoi il est vraiment question. C’est une véritable tragédie. UNIVERSAL TRAGEDY ! Il n’y a qu’une issue possible : le bain de sang. Et pas une baignoire, non, un raz de marée, un déluge de sang. Et voilà, ce sang ne coule pas comme un liquide justement, il se fige, petit à petit, comme de la glace. Je sais plus quel sociologue faisait remarquer la froideur du social, la frilosité naturelle à ce « corps ». Evidement puisque ce truc, c’est pas un corps, c’est un monstre. C’est la baleine de Jonas.
Jésus reprend fort à propos qui dit : pas de royaume de Dieu sur la terre. Pas de paradis social. Ne cherchez pas le bonheur sur la terre. Complètement anti social le Jésus, pas comme l’autre pédé de Trust qui perd son sang froid, mais pas le nord. L’antisocial a peut-être le sang bouillant d’un révolutionnaire, mais les résultats de sa croisade sont pas fameux, vieux : il a fait peur à tous les gamins qui l’écoutaient ravis. Dès le dernier accord se sont vite réfugié où ? dans le sein du social, au chaud sous les mamelles, à se couvrir du plus de fétiches possible pour combler leur froideurs de cadavres mort-né. Toute cette chienlit de chanteurs, faux héraut montés sur des chimères de bruit et d’harmonie, tout en servant une parole révolutionnaire mangeait dans la main de la société, à tous les râteliers. Pour les abrutis, mais il faut rien exclure, ils sont les plus nombreux, il leur faudrait grave un cour de rattrapage. Pour les vrais fumiers c’est moins grave, et d’ailleurs ils sont pas si nombreux, ils s’amenderont. Mais voyez comme c’est tout simple, les innocents, les vrais, comprenant soudain l’ampleur de leur erreur, se rallient à la vérité. Ils sont les plus nombreux, j’en suis.
Il s’agit pas de bannir la propriété. Il s’agit que chacun possède à contre cœur, que la possession ne gouverne pas le cœur. L’adoration du veau d’or a conduit à de grands malheurs. C’est évident qu’on ne possède jamais rien, puisque le temps nous échappe. Un jour où l’autre il faut tout laisser. Tu crois quand même pas qu’ y a des ferries pour le paradis et que tu vas pouvoir prendre ta bagnole ou ta pute préférée. Ça serait assez réducteur comme les musulmans avec leurs vierges. D’ailleurs si j’étais musulman je me ferais chrétien. Mais je crois que c’est pas possible. Comme pour les orthodoxes, t’as pas le droit de changer. De là que je me sens plutôt catholique. Mais restons chrétien, comme Shakespeare ou Molière. Ha Molière, étonnamment perspicace, on peut y deviner des contacts intelligents. Pour Shakespeare la connexion avec Francis Bacon transpire abondement. Tant et si bien que des thèses sont posées. Aucunes preuves cependant ni d’un côté ni pour infirmer, rien. Pas facile pour le con moyen d’en décider a priori. Mais le con moyen se faisant curieux, il peut découvrir que le cas de Shakespeare est une sorte de miracle. Car tout dans Shakespeare dénonce le monstre social, celui-là même qui réduit la science et l’art. D’où vient le succès immarcescible de Shakespeare ? D’où lui vient cet « aura » irréprochable ? d’où vient que le seul écrivain français du Xxéme siécle aurait donné toute son œuvre pour deux vers de Shakespeare ? Un miracle je te dis.
Le trésor que nous avons foulé au pied, c’est la parole de la générosité, celle qui fait régner la joie dans n’importe quelle propriété. Si vous tenez absolument à posséder des joyaux allez-y, mais venez pas vous plaindre après d’être triste et malade. En ce qui me concerne vous serez des malades imaginaires. Voyez ce que je veux dire.
Alors adieu tristesse, à bas les traitres doutes, qu’on envoie l’apocalypse et qu’on en finisse avec cette putain de société… !